L’utopie jésuite

Un contrat social et religieux basé sur la triple obligation de donner, de recevoir et de rendre.

 

Propriété et commerce : un système mixte

L'utopie jésuite

Sur le même modèle que la « République chrétienne » des missions du Paraguay, « la cité heureuse », les jésuites établirent à Chiquitos un système mixte reposant sur la propriété collective et individuelle, abolissant la monnaie et la notion de profit individuel et assurant protection aux « réduits ».

Au sein des réductions, il fut donné à chaque famille une parcelle appelée aba-mba’e (« la propriété de l’Indien»). « Libres et égaux en droits » une fois convertis, les natifs purent ainsi accéder à la propriété et gérer leurs terres selon un modèle ressemblant à celui des coopératives. Les produits récoltés – manioc, maïs, haricots, citrouilles, canne à sucre, bananes, citrons – étaient déposés dans un magasin public pour être ensuite retirés au fur et à mesure, selon les besoins de chacun. Ce système valait également pour les vêtements et les médicaments. Les terres collectives, ou tupa-mba’e (« propriété de Dieu »), étaient, quant à elles, gérées par la réduction et travaillées la moitié de la semaine par tous les membres de dix-huit à cinquante ans. Les fruits de Dieu servaient ainsi à nourrir les membres non productifs (malades, handicapés, veuves ou orphelins), à créer des réserves en cas de crise, et également à payer le tribut de la Couronne royale.

Concepción, Santa Cruz

La monnaie ayant été abolie, les échanges commerciaux se faisaient à l’échelle locale grâce à un système de troc. L’excédent produit était réservé en priorité à l’embellissement des églises, à l’amélioration des structures, puis à l’échange commercial. Ce système excluait l’enrichissement personnel et la thésaurisation.

La localité de San Javier se spécialisa ainsi dans la fabrication d’instruments de musique et approvisionna les villages missionnaires. Parmi les autres produits d’exportation des missions, on trouvait la cire, les toiles de coton, les chaussures de cuir et les malles; et parmi les produits d’importation le fer, l’acier, l’étain, les tissus européens, la farine pour les hosties, le vin, les couteaux, les livres et le papier. Les produits d’exportation étaient regroupés à San Javier avant d’être acheminés à Santa Cruz, Charcas ou Potosí, où ils étaient vendus dans le but d’acheter ce dont les missions avaient besoin. Toléré un temps, ce système connut de nombreux détracteurs quand s’amplifia le capitalisme.

Le temps des loisirs était également mis en commun et à contribution de tous. Il était notamment dédié à l’étude de la nouvelle langue commune ou encore aux activités artistiques et musicales.

 

La gouvernance, entre participation et obéissance

San Javier de Chiquitos, Santa Cruz

Deux missionnaires étaient à la tête de chaque réduction. Leurs responsabilités se divisaient selon qu’elles étaient liées au spirituel ou au temporel – deux temps distincts qui rythmaient la vie des réductions. L’un s’occupait de l’évangélisation des habitants, de l’enseignement de la doctrine chrétienne, du suivi des pratiques et des devoirs religieux ; l’autre de la supervision administrative et des questions relatives aux ateliers, des parcelles agricoles et des zones de pâturage. Ils étaient secondés pour les affaires courantes par un natif élu pour une année par les siens, ainsi que par des maîtres, capitaines ou majordomes en charge du fonctionnement et de l’entretien des espaces et ateliers communs, religieux ou civils.

L’administration quotidienne de la réduction était, elle, gérée par un cabildo, une sorte de « conseil municipal », placé sous l’autorité des pères, et composé de huit membres nommés ou élus pour un an. À sa tête, un « corregidor » choisi par le gouverneur de Santa Cruz sur proposition des jésuites et des Indiens, un adjoint du « corregidor », un sous-lieutenant, deux alcades, un commandant, un magistrat ou justicia mayor et un sergent. Chacun des membres était également juge et représentait les ethnies dont étaient issus les nouveaux villageois.

San Javier de Chiquitos, Bolivie

Indépendamment du « conseil », et sous l’autorité directe des missionnaires, étaient nommées des personnes en charge des travaux, ateliers et activités du village : un maître de chapelle pour la musique, son enseignement et son orchestration, un sacristain pour le culte, un capitaine pour surveiller les estancias, un économe, un capitaine de peintures et de décoration, un capitaine de l’atelier de bois et de charpente, un capitaine pour les rosaires, un pour le fer forgé, un pour la fabrication d’objets en argent, un pour les tissus, un pour le travail du cuir, et bien sûr un pour la cire.

 

Justice, protection et sécurité pour les convertis

San Javier de Chiquitos, chapelle intérieure

La justice était rendue par le cabildo selon un code civil et pénal avancé pour l’époque : la peine de mort n’existait pas, la torture était interdite et il n’y avait pas de peine excédant plus de dix ans de prison. La sanction la plus fréquente était le fouet. Une fois convertis au christianisme, les Indiens ne pouvaient plus être réduits en esclavage. Des milices communautaires furent également mises en place dans certaines réductions pour protéger les natifs des Encomenderos. Les méfaits de ces derniers renforcèrent et légitimèrent aux yeux des natifs les réductions qui leur offraient une protection.

Inspiré, selon certains, du roman Utopie de l’écrivain catholique anglais Thomas More en 1516, ce système expérimental cherchant à développer en conformité avec l’Evangile un homme « complet » a attisé, au fil des siècles, la curiosité et la verve de nombreux intellectuels et philosophes.

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